Le monde est en ébullition, mais mon honneur est sauf.

juin 12, 2008

Une erreur de casting, une grave erreur, voila ce à quoi je pense, noyé dans une foule d’ados pré-trentenaires vêtues de copies de Prada et sentant, toutes, le J’adore de Dior. Pourquoi ont elles toutes le même parfum ? Pour les mêmes raisons qu’elles ont toutes le même sac à main.

J’ai chaud, j’analyse la situation et continue de chercher mon ego perdu là, quelque part au fond de mes chaussettes. Non, je n’attends pas devant un Zara le premier jour des soldes, ni devant un concert privé de Madonna, mais bel et bien à la première du film Sex and the City. Un pan de la culture mondiale m’a donc échappé, qu’importe que je connaisse Rilke, Proust ou Whitman, si je n’ai jamais vu un seul épisode de cette série. Je suis has been, vieux, rétrograde, pédant… J’angoisse. Toucher le papier granuleux d’un livre est devenu un plaisir de pervers aveuglé par les années accumulées. Manque de chance, mon déguisement du jour tombe parfaitement dans les codes socioculturels admis ce soir là. Je suis habillé en un CSP + consommateur avide de culture mais ne connaissant pas le terme spiritualité. Chemise blanche, col Italien et bouton de manchette gros comme une montre de libanais, gilet gris 5 boutons et pour finir un gilet noir manche longue. Je suis donc un cliché ambulant sur lequel il ne faut quand même pas tirer tout de suite. CSP+ as-tu donc une âme ?

Assis dans mon fauteuil rouge je contemple la « jeunesse » parisienne venue goûter l’Ostie au goût de vie fantasmée. Certains hommes voudraient être Jack le Pirate, les femmes, elles, veulent être Sarah Jessica Parker. Hors il est à peu près aussi réaliste d’espérer devenir un beau pirate immortel aux dents blanches, que de se pavaner avec un sac Prada à 1300€ ou d’avoir les jambes de la sus dis Parker. Le film se déroule, je me liquéfie, la salle applaudie lors de certaines répliques, je commence à remettre en cause Beckett. Je suis en apesanteur dans un vide intersidéral recouvert d’un vernis Dior, Chanel et Westwood. Je sers les dents, j’attends, souris et continue de croire en l’humanité.

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No Comments

  • Reply Samsarah septembre 22, 2008 at 8:45

    Bravo !
    Votre note est bien envoyée, drôle et cruellement vraie; et c’est ici que tt me porte à vous le dire :
    J’adore votre blog, vos photos, votre regard 😛 – que je viens de découvrir !
    Je reviendrais…
    Excellente continuation.

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